Dr Farouz, qu’est-ce qu’une allergie et pourquoi cette augmentation du nombre de malades ?

L’allergie est une réaction anormale de l’organisme vis-à-vis d’antigènes environnementaux par la production d’anticorps (IgE). Les principaux éléments de l‘environnement humain entraînant cette réaction sont les acariens, les poils d’animaux, les pollens, les moisissures, les aliments, les médicaments, et certains produits chimiques tels que le nickel, les parfums et les colles. Les réactions allergiques vont du simple éternuement jusqu’au choc anaphylactique – qui peut mettre la vie en danger –, en passant par la crise d’asthme ou d’urticaire. Une fois le processus allergique engagé, apparaît une amplification par des réactions en cascade qui conduiront à un processus inflammatoire chronique dans lequel de nombreuses cellules et médiateurs chimiques sont impliqués. Pour chaque manifestation de l’allergie, plus le traitement est instauré précocement, moins le risque de voir s’installer un processus inflammatoire chronique sera important. Une association entre des facteurs génétiques et d’environnement est certainement l’une des principales causes de cette augmentation des maladies allergiques.

Pourquoi la création d’un label et pourquoi votre implication dans ce projet ?

L’ARCAA (Association de Recherche Clinique en Allergologie et Asthmologie) a été créée en 2006 par l’ANAICE, le syndicat des Allergologies, Immunologistes et Cliniciens exclusifs. En avril 2009, les deux syndicats d’allergologues se sont regroupés en un seul, le SYFAL (Syndicat Français des Allergologues), qui comprend 2205 membres, 550 médecins allergologues exclusifs, et des spécialistes avec une activité allergologique : pneumologues, dermatologues, ORL, pédiatres, etc. Dès que je me suis installé en 1982, je me suis investi dans la formation continue et le syndicat. J’avais déjà été sollicité par un fabricant de peinture qui souhaitait une caution scientifique pour ses peintures acaricides. Ses vertus avaient été prouvées par l’Institut Pasteur, sauf que les acariens ne sont pas sur les murs ! J’ai d’autres exemples similaires, qui ont abouti à une multitude de labels farfelus, répondant surtout à l’angoisse de parents d’enfants allergiques. La demande était réelle et nous devions rendre tout cela cohérent et scientifique. Comme nous manquions de temps, Patrick Danset du cabinet RLab Conseil s’est joint à nous pour nous aider. C’est ainsi que l’ARCAA a créé un label Allergènes Contrôlés. 

Quel est l’objectif de ce label ?

L’objectif est de réduire significativement les allergènes dans les espaces de vie. Nous souhaitons d’abord mobiliser les industriels en les conseillant à innover et fabriquer des produits performants et adaptés, puis réaliser des actions de lobbying auprès des pouvoirs publics.
Nous cherchons à apporter la preuve médicale et scientifique de l’efficacité des produits. Car le premier traitement de la maladie allergique est la suppression de l’allergène, dans la mesure où elle est possible. Parmi ces principaux allergènes dans les espaces de vie, nous ciblons d’abors les allergies respiratoires, les plus fréquentes :

  • Les pollens allergisants : graminées, arbres ;
  • Les chats : une protéine présente dans la salive et les squames de chats ;
  • L’acarien : la protéine retrouvée essentiellement dans les fèces ;
  • La moisissure Altenaria : la seule dont la responsabilité en allergie soit certaine.

Nous étudions les produits anti-allergiques existants en les donnant à tester à des laboratoires indépendants, qui en font une évaluation, une approbation et une notation. Nous souhaitons également mobiliser la communauté des médecins allergologues en les impliquant dans la sélection et l’évolution des programmes scientifiques dans l’allergie et l’asthme, développés dans des instituts de recherche médicale. Puis les financer grâce aux royalties du label dont une partie sera reversée dans un fonds de dotation.

Peut-on imaginer labelliser aussi les espaces de vie, et pourquoi pas les bureaux ?

C’est le but. Nous sommes organisés en groupe de travail de médecins pour anticiper les demandes, réfléchir à une adéquation entre le désir des industriels et les normes qui existent. Mais l’exercice a des limites. On peut imaginer labelliser des bureaux à leur livraison, en veillant aux textiles utilisés, à l’aspiration, à la climatisation et au traitement d’air, aux revêtements de sols et de murs, à la mise en place du processus d’entretien et de maintenance. Une photocopieuse rejette plus ou moins d’ozone, et certains cuirs trannés au chrome peuvent créer des allergies de contact. Mais un salarié pourtant bien intentionné peut diffuser une huile essentielle dont l’odeur peut se révéler très irritante. Un autre peut amener malgré lui des poils de chat sur ses vêtements dans l’open space, et un vieux meuble en métal d’un autre âge peut libérer des particules irritant une personne sensibilisée. C’est pourquoi le label est valable pour une année donnée et qu’il fonctionne par un système de notations. Les notes "premium" ou "excellence" signifient que toutes les précautions ont été prises pour qu’il n’y ait aucun retentissement allergique, et "simple" que, à notre connaissance, l’espace ou le produit est hypoallergénique.

Quels sont les objectifs de l’association à long terme ?

Nous souhaitons diffuser au maximum ce label en France, puis essayer d’influencer certaines normes existantes. D’autres labels existent dans les pays européens, en Suède, en Grande-Bretagne ou en Suisse notamment. Nous les rencontrons actuellement pour harmoniser nos référentiels pour qu’un label soit adopté à l’échelle européenne.

Voir en ligne : https://arcaa.info