Dans quel contexte intervenez-vous ?

La solution que nous proposons est une réponse aux nombreuses problématiques rencontrées en entreprise, qu’elles soient sociales, économiques, environnementales ou organisationnelles. Nous proposons des solutions clé en main aux problèmes de stress au travail depuis 20 ans, grâce à nos trois métiers qui sont les aménagements ergonomiques de postes et espaces de travail, la prévention en santé et sécurité et l’optimisation des relations sociales. Mais il y a 10 ou 15 ans les entreprises me riaient au nez : ni l’ergonomie ni les sciences humaines n’avaient pénétré l’entreprise. Aujourd’hui, ces problématiques sont devenues d’actualité, et des textes de lois obligent même à prendre des ergonomes ! C’est par l’apprentissage de cette première discipline que j’ai paru plus crédible dans un premier temps en entreprise, en y entrant par un angle purement scientifique. Mais à cette date là, les gros problèmes avaient déjà commencé. Tous les ingrédients étaient réunis pour que quelque chose de grave arrive. Maladies, dépression, TMS, étaient des alertes qui allaient vers l’inévitable. Aujourd’hui les gens ne se suicident plus uniquement par amour ou parce qu’ils sont ruinés, ils se suicident parce qu’ils ne sont pas bien dans leur travail. Heureusement, à l’instar de l’écologie, il y a une prise de conscience qui s’opère, au moins au niveau étatique. Notre plus grand défi aujourd’hui est de persuader les entreprises de faire différemment. On ne s’imagine pas à quel point le confort, le bien-être au travail est un énorme déclencheur de productivité ! Les gens en France ont une vraie conscience professionnelle, s’ils sont aussi stressés au cœur des entreprises, c’est bien parce qu’ils sont impliqués ! Quel dommage de gaspiller ces bonnes volontés. 

Quel parcours professionnel vous a amené à traiter de ces problématiques ?

J’ai une formation d’architecte d’intérieur, donc une sensibilité à l’esthétique et à l’environnement clos : maison, usine, atelier, bureaux… Très attiré par l’Asie du Sud-Est, j’ai eu l’opportunité il y a 30 ans d’y partir plusieurs mois avec un ami grand reporter, notamment pour un documentaire sur la religion. J’ai pu pénétrer dans une trentaine de monastères très anciens (au Laos, en Birmanie et en Thaïlande), où il y avait toujours un petit jardin japonisant attenant. Je me suis aperçu que dès que je m’y asseyais, je me sentais anormalement détendu. C’est-à-dire que mon rythme cardiaque, après une marche éprouvante, revenait au repos en ¼ d’heure, ce qui est exceptionnel ! De passage dans une université, j’ai pu étudier des documents sur ces jardins de moines. En observant la nature pendant des centaines d’années, ils ont constitué ces espaces parfaits destinés à faire baisser le rythme cardiaque et entrer en méditation le plus rapidement possible, par la forme et l’emplacement des cailloux et des végétaux par exemple. J’en ai conclu que si l’environnement pouvait détendre, il pouvait aussi entraîner des modifications positives (ou négatives) sur le moral, l’envie de se dépasser, la communication interne... J’ai appris plus tard que des stimuli actionnés par l’environnement envoient dans le corps des hormones qui vont déclencher des comportements. L’environnement a un impact direct sur nos comportements, et c’est ce que je me suis efforcé de prouver les 15 années de recherche suivantes.
 

En quoi ont constitué ces recherches ?

J’ai reconstitué en 8 à 10 ans, grandeur nature, un jardin de moines du VIIIème siècle, qui a constitué notre premier laboratoire de recherche. Il respecte à la lettre l’architecture et l’ergonomie de l’époque Nara. Notre bureau d’étude se situe désormais au cœur d’un hôtel particulier au centre de Bordeaux au milieu duquel se trouve ce célèbre Jardin japonais de Nansouty. Ce laboratoire a validé le début de nos recherches sur les déclencheurs comportementaux déjà utilisés au VIIIème siècle et sur le bien-être sensoriel. Je suis reparti à l’université pendant 7 ans pour compléter mes connaissances par l’ergonomie, la psychologie, la sociologie, l’éthologie comportementale et l’anthropologie animale, et comprendre scientifiquement ces expériences empiriques. Ma thèse a suscité l’intérêt et, fin des années 80, l’Etat français s’est intéressé à mon travail, suite aux premiers problèmes dans les centrales nucléaires, les caisses d’allocations familiales et la sécurité sociale. Je me suis mis à régler leurs problèmes humains par l’environnement, tant au niveau de la sécurité que du social. Les comportements déviants peuvent être modifiés par l’environnement pour la sécurité, l’apaisement et le bien-être. L’environnement est un vrai médicament ! La méthodologie s’est mise en place et les résultats se sont avérés rentables et durables. J’ai ensuite commencé à travailler pour les plus grandes entreprises françaises. 

Sur quel principe s’est créé ESI Concept ?

Notre cabinet s’est créé en 1994, mais nous travaillons à 3 sur ces problématiques depuis 1985. Nous sommes un cabinet d’architecture intérieure réunissant dans un nouveau métier les compétences liées d’ergonomie, d’éthologie et de sociologie. Nous avons aussi étudié la psychologie et la sémiologie. Ils donnent à notre bureau d’étude la pluridisciplinarité nécessaire à l’application de nouvelles méthodes de travail. Au croisement de ces principaux métiers est née une approche : l’ergonomie sociologie d’intérieur qui s’est transformée en un nouveau métier : l’architecte écologue.
 
Notre démarche est principalement basée sur deux fondements. Tout d’abord, l’optimisation technique et sensorielle du cadre de travail où tous les éléments sont référencés du sol au plafond, où chacun est optimisé pour participer à une dynamique d’amélioration, que ce soit au niveau ergonomique (mobilier, postes, flux...), acoustique / phonique ou encore de la luminosité et des matériaux, ... ceci pour améliorer les performances et l’appropriation du poste de travail. Les conditions optimales de travail créées, elles dissipent toutes nuisances, ce qui privilégie une situation de bien-être sensoriel entraînant une réaction en chaîne de modifications positives. Avec des conditions de travail améliorées, on se sent bien, mieux, ce qui a une incidence directe sur le travail du collaborateur qui devient alors plus réactif, plus naturel… Il en va de même pour le visiteur, qui se sentira mieux dans un espace adapté qui correspond à ce qu’il attend et à ce qu’il recherche. L’environnement va jouer un rôle clé dans la mise en condition de l’opérateur et par conséquent sur la qualité de vie, ou dans celle du prospect et donc sur sa décision d’achat. Ainsi l’environnement est un outil de gestion du potentiel humain et d’optimisation générale de la structure, mais il est aussi acteur principal de la prévention des risques et des comportements déviants : protection contre l’apparition de Troubles Musculo-Squelettiques, d’accidents du travail, de stress, de conflits ou d’absentéisme. Sachant que tous ces éléments sont liés et forment une mécanique avérée, nous proposons une solution d’utilité globale en réponse aux nombreuses éventuelles problématiques qu’elles soient sociales, organisationnelles, économiques ou environnementales. Justement sur ce principe d’utilité globale, la CRAM Aquitaine, L’ARACT Aquitaine et l’OPPBTP ont habilité ESI Concept en tant qu’Intervenant en Prévention des Risques Professionnels pouvant intervenir pour la qualité de vie et les performances dans toutes les entreprises sur toutes les thématiques organisationnelles et techniques. 

Comment cette influence de traduit-elle concrètement dans l’environnement de travail ?

Elle peut passer par de nombreux vecteurs : mobilier, acoustique, lumière, brillance, couleur. Le rouge augmente le rythme cardiaque. Associé à un brillant particulier, on s’en sert pour la sécurité par exemple. Les directions font le plus souvent appel à nous pour des plaintes liées à l’open space. Mis en place pour favoriser la communication et gagner de l’espace, les salariés se plaignent du bruit, n’arrivent plus à se concentrer sur leur travail, et le font savoir. De trop nombreux open space sont mal faits, alors que tous les ingrédients sont réunis pour bien faire. Même en espace ouvert, il faut que le salarié ait l’impression d’être dans un espace fermé. L’aménagement peut alors servir à travestir la réalité, en travaillant sur l’acoustique, les vis-à-vis, les couleurs, les matériaux, le mobilier et la décoration. Un salarié peut avoir un poste adapté mais mal s’en servir. Or ces bonnes pratiques doivent être instinctives, naturelles, voire innées. L’environnement doit guider spontanément les flux de circulation, la posture, etc. Dans une entreprise, il y a toute sorte de métiers, des gens qui ont besoin de réfléchir, d’écrire, de téléphoner, qui travaillent sur l’avenir, sur le présent. Mais tous ont le même poste de travail. Or il faut adapter la sensorialité du poste de travail à l’individu. Ce qui n’empêche pas l’uniformisation du mobilier, ni de s’adapter à tous les budgets ! Bien sûr, l’idéal est de travailler en amont du projet plutôt qu’en curatif. Ces comportements existent déjà chez les artisans : l’établi du boucher lui est parfaitement adapté. Mais on en n’est qu’à la genèse dans le tertiaire !

Comme je suis éthologue, pour comprendre les comportements, en entreprise comme ailleurs, je me réfère à la manière dont se comporte un être humain dans son animalité. Nous sommes des animaux dans nos comportements à 80%, plus que nos comportements de culture. En intervention, je vais actionner des codes animaux instinctifs en priorité : les canaux de culture changent, mais les canaux sapiens-sapiens sont pérennes, quels que soient les âges, les sexes, la nationalité ou les problématiques de l’entreprise. Nous avons travaillé pour des entreprises aussi différentes que THALES AVIONICS, EADS, des industries alimentaires, Bouygues Construction et ses filiales, ou encore les mairies de Bordeaux, Lescar, les CHUs de Bordeaux, le ministère de la justice, la CARSAT,...