Qui sont les 5.5 Designers ?

5.5 Designers est une jeune agence de design, que nous avons créée en août 2003, juste après avoir été tous les 5 diplômés de l’Ecole Nationale Supérieure des Arts Appliqués et des Métiers d’Art ( ENSAM ) de Paris. Notre diplôme, le DS « Arts Appliqués Créateurs Concepteurs » est général ; nous pouvons aussi bien être amenés à dessiner un stylo qu’un tramway ! 
Pour notre premier projet, nous nous sommes intéressés aux objets de récupération et objets oubliés dans les vide-greniers, afin de créer un nouveau système de production d’objets. Avec ce projet, appelé Réanim, nous avons créé une nouvelle discipline : la médecine des objets. Nous avons présenté ce projet au Salon du Meuble à Paris en 2004, où les médias nous ont repérés. Cela nous a ouvert des portes. Même si ce projet avait une esthétique particulière, nous l’assumons en tant que projet de design industriel pur et dur. C’était un questionnement sur la manière dont on pouvait pratiquer le design : chaque projet est une remise en question de la façon dont nous travaillons. Même si des schémas se répètent, aucune méthode ne s’applique pas stricto sensu.

 

Comment travaille-t-on à cinq ?

Nous travaillons tous ensemble pendant la création, puis nous nous répartissons les projets et les tâches. Nos différents regards nous enrichissent beaucoup, et forcent la remise en question. Nous cultivons un certain éclectisme qui fait que de temps en temps un produit peut en enrichir un autre. Il y a cinq personnalités sous le nom de 5.5, et chacune apporte un point de vue, une culture et une optique différents qui donnent tout l’intérêt au travail en groupe, puisque la remise en question doit être très rapide.

Comment s’illustre cette remise en question de chaque instant ?

Sur le projet Réanim nous sommes intervenus directement sur les pièces pour faire un travail de recherche pour des solutions « manipulant ». Avec de grands groupes, comme Arc International – Salviati, dans l’univers de la verrerie, nous passons par des phases de dessin que nous proposons et qui sont ensuite réalisées, dans un schéma plus standard de conception design. 
Chez Bernardaud, nous sommes intervenus directement dans le processus de fabrication, c’est à dire à même le site de production, où nous devions apporter un décalage et une créativité nouvelle. A chaque projet nous nous posons la question de savoir pourquoi nous faisons un objet de plus, et quelle est la meilleure méthode pour y arriver. Il y a une phrase que nous aimons beaucoup ici, de Danielle Quarante , qui est : « Pour innover, il faut concevoir la conception ».

 

 

Quels sont vos autres domaines d’intervention ?

La scénographie, pour le centre George Pompidou avec l’APCI, (Agence pour la promotion de la création industrielle), pour des éditeurs indépendants comme La Corbeille, pour de l’équipement hi-fi, des animations de festivals...

Quelle est votre philosophie ?

Nous sommes tous les cinq amoureux des objets, des plus anecdotiques, ceux qu’on trouve sur les puces, ceux des années 70, à ceux issus de la dernière innovation hi-tech. Nous sommes très attentifs au monde des objets, on peut y voir la société au travers ! Créer des objets, c’est être vraiment acteur de la société. Nous essayons de susciter des questions par l’objet, qui vont traiter de problèmes sociaux, économiques, politiques, techniques, patrimoniaux. Il y a énormément de valeurs autour de l’objet !

 

Qu’est ce qui vous a intéressés dans le projet ACTINEO ?

Ce projet nous a intéressés par l’éloignement des concepts actuels d’aménagement de bureau avec notre propre manière de travailler. Quand nous voyons la plupart des aménagements réalisés dans le tertiaire, nous nous demandons comment les gens peuvent s’y sentir bien ! 
Chez nous le mobilier de bureau est complètement éclectique. Chacun a eu son budget pour acheter son siège, son luminaire, et la table est une table de château récupérée ! Bien sûr nous sommes dans un environnement créatif, mais cela nous a conduit à nous demander pourquoi n’importe quel salarié ne pourrait pas avoir la même envie. Nous nous sommes dit qu’il n’avait pas le choix de s’exprimer ni de pouvoir créer son univers. Qui n’a jamais scotché sa photo de famille ou celle de son chien sur son bureau ? Lors d’une réunion, pourquoi sommes-nous tous assis sur les mêmes chaises ? Tout le projet consiste à équilibrer le mode de travail collectif et la performance du groupe et le bien être individuel. L’idée est de permettre une réelle appropriation par les collaborateurs de leur outil de travail, tout en assurant une cohérence et un fonctionnement au sein de l’entreprise.

 

 

Pouvez-vous nous dire quelques mots sur la démarche que vous avez menée ?

Notre idée est de faire une préconception des objets que chacun « termine » comme bon lui semble, avec des éléments qui fonctionnent ensemble. La différence entre le bureau et chez soi, hormis l’activité, est le pouvoir de choisir son aménagement et son mobilier. Et nous ne sommes pas sûrs que pour l’image de marque de l’entreprise, un aménagement neutre et un mobilier homogène soit forcément la bonne solution. Pourquoi l’hétérogénéité serait-elle forcément contre-productive ?Que les gens puissent s’exprimer peut aussi être une manière de valoriser l’entreprise : « On est une entreprise pluri-personnelle, avec des groupes et des individus différents mais qui travaillent dans le même sens ». Notre but n’est pas de proposer une solution universelle mais une alternative. Ce projet propose une certaine vision d’un futur proche, mais compréhensible et accessible. Nous aurons gagné si notre proposition fait réfléchir…Ce qui est complexe, c’est qu’il y a beaucoup de cultures d’entreprises différentes, avec des objectifs différents. Notre réponse doit en être un compromis. Et du même coup le projet s’avère très riche !